Les “Sociétés Civiles Immobilières”

La société civile immobilière – SCI – a pour objet de gérer un patrimoine immobilier dont elle est directement propriétaire, les associés ne détenant que des parts sociales.

1. Types de SCI

En fonction de leur objet, on distingue plusieurs catégories de SCI :

• les sociétés civiles de placement immobilier – SCPI ;

• les sociétés civiles de construction-vente ;

• les sociétés immobilières dites “de copropriété” (parmi lesquelles figurent SCI d’attribution et SCI de location) ;

• les sociétés d’accession progressive à la propriété.

Principales catégories de SCI au sens large :

Catégorie de SCI Activité Principale
SCI de construction-vente Construction d’immeubles en vue de leur vente en totalité ou par fractions.
SCPI Acquisition et gestion d’immeubles locatifs.
SCI d’attribution Acquisition ou construction d’immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés.
SCI de location Gestion et location d’immeubles acquis, construits ou ayant fait l’objet d’un apport.
SCI d’accession progressive à la propriété Détention, gestion, entretien d’immeubles apportés par un organisme HLM, en vue de leur division en fractions destinées à être louées à des personnes physiques dont les ressources ne dépassent pas certains plafonds.

2. Sociétés civiles de construction-vente

 Objet social

Les sociétés civiles de construction-vente ont pour objet :

• principal, de construire un ou plusieurs immeubles en vue de leur vente, en totalité ou par fractions.

• accessoire, d’exercer certaines activités nécessitées par l’opération de construction et de gérer les immeubles construits jusqu’à leur vente.

Remarque

Ce type de société réunit, généralement, un ou plusieurs promoteurs et des apporteurs de capitaux, l’ensemble étant souvent qualifié de “tour de table”. Il constitue le moyen classique d’associer des investisseurs, des particuliers ou des personnes morales, à des opérations de construction dites de “promotion immobilière”.

Les capitaux ainsi réunis, le plus souvent augmentés de capitaux empruntés, vont permettre d’édifier un ou plusieurs immeubles commercialisés :

• dans le cadre d’un “contrat de vente d’immeuble à construire” ou “vente en état futur d’achèvement”,

• plus rarement, dans le cadre de la vente à terme.

 Droits et responsabilités des associés

Les associés :

• ne peuvent pas se voir attribuer, en jouissance ou en propriété, tout ou partie des immeubles construits par la société, mais peuvent les acheter,

• doivent répondre aux appels de fonds de la société,

• sont responsables des dettes de la société sur tous leurs biens, à proportion de leurs droits sociaux,

• se partagent les profits réalisés à proportion de leurs apports.

 Régime fiscal

Il comporte deux points essentiels :

• la société n’est pas imposable à l’IS,

• les associés sont imposés en fonction de leur quote-part des bénéfices réalisés, qu’ils aient été perçus ou conservés par la société. Ils ne bénéficient d’aucun avantage fiscal.

Lors de la cession de leurs parts, les associés sont imposables selon le régime des plus-values immobilières.

3. SCI d’attribution

 Objet social

Les SCI d’attribution ont pour objet principal la construction ou l’acquisition d’immeubles en vue de leur division par fractions (en appartements, le plus souvent) destinées à être attribuées (et non vendues) aux associés, en propriété ou en jouissance.

Sont également autorisés la gestion et l’entretien des immeubles, jusqu’à la mise en place d’une organisation différente, ainsi que la location pour le compte d’un ou plusieurs associés de tout ou partie des immeubles.

 Droits et responsabilités des associés

Les associés :

• doivent répondre aux appels de fonds de la société et participer aux frais de gestion,

• ne peuvent céder leurs parts qu’à condition d’être à jour de leurs obligations envers la société, notamment,

• sont en droit d’exiger la remise de leur lot en fin d’opération (s’ils ont réglé leur dû) et de céder leurs parts dans la société.

 Garanties pour les associés

Pour éviter que de petits propriétaires ne s’engagent au-delà de leurs moyens dans une “fausse” coopérative montée par un promoteur, la loi multiplie les garanties que doivent apporter :

• les gros souscripteurs (souscription pour plus de 2 logements),

• ou des tiers qui voudraient que la société commence les travaux avant d’avoir réuni suffisamment d’associés, et donc de fonds.

Par ailleurs, les sociétés ayant pour objet la construction d’un immeuble à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation sont tenues :

• soit de conclure un contrat de promotion immobilière avec un promoteur-constructeur chargé de la réalisation,

• soit de confier cette réalisation à leur représentant légal ou statutaire, à la condition que lesdites opérations aient été définies au préalable par un écrit.

Cette obligation constitue une importante garantie, le promoteur devant s’engager sur un prix ferme et définitif. Tant que le contrat de promotion ou l’engagement du gérant n’est pas signé, aucun versement ne peut être demandé aux associés, exception faite des sommes nécessaires aux études techniques et financières du programme et à l’achat du terrain.

 Régime fiscal

Les sociétés civiles d’attribution sont transparentes et n’ont donc pas de personnalité distincte de celle de leurs membres. Les associés sont donc :

• personnellement soumis à l’IR (ou IS, le cas échéant),

• pour la quote-part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société,

• imposables selon le régime des plus-values immobilières lors de la cession de leurs parts.

 

4. SCI de location (ou “SCI familiale”)

 Objet social

Les SCI de location ont pour objet principal l’administration ou la gestion d’un ou plusieurs immeubles locatifs reçus en apport ou acquis par la société (le plus souvent, au moyen d’un emprunt ou d’un apport en compte courant).

La SCI ne doit pas avoir pour activité principale et régulière l’achat et la revente d’immeubles ou la location en meuble. À défaut, elle perd son caractère civil et devient une société commerciale, soumise à l’IS.

Une société civile de location peut être ainsi créée :

• dans un cadre familial – société civile “familiale” – pour répartir un bien immobilier ou un ensemble d’immeubles entre plusieurs membres de la famille, pour en faciliter la transmission ultérieure et éviter les incertitudes de l’indivision,

• dans le cadre d’une PME, pour acheter des locaux professionnels et scinder le patrimoine immobilier de l’activité commerciale,

• par des investisseurs, pour isoler et bien identifier un groupe d’immeubles servant, par exemple, de support à un contrat d’assurance-vie, etc.

Remarque

En cas de vente du logement familial détenu par une SCI dont l’un au moins des époux occupant le bien est associé, le consentement du conjoint n’est requis que si l’époux associé est autorisé à occuper le bien en vertu d’un droit d’associé ou d’une décision unanime (Cass. 1re civ. 14-3-2018 n° 17-16.482).

 Comparaison entre indivision et SCI

Être associé d’une société civile équivaut un peu – en pratique – à participer à une indivision pastedGraphic.png. Néanmoins, ces deux mécanismes sont régis par deux statuts juridiques totalement différents :

• l’indivision est une situation juridique et non une personne juridique : les droits des indivisaires portent sur le bien dans son ensemble,

• la société civile est une personne morale propriétaire d’un bien : les droits des associés ne portent que sur les parts de la société (et non sur le bien).

L’avantage que peut présenter la société civile par rapport à l’indivision est qu’un seul associé ne peut pas demander la dissolution de la SCI, alors qu’un indivisaire peut toujours exiger la fin de l’indivision et donc l’éclatement d’un bien (sauf cas d’indivision conventionnelle conclue pour une durée déterminée).

Cependant, ce formalisme peut se révéler très pesant en cas de mésentente entre les associés ou lorsque l’un d’eux désire sortir de la SCI pour des raisons personnelles.

Cas pratique

Le propriétaire d’un bien immobilier indivis désire apporter ses droits à une SCI de location. Son coïndivisaire peut-il faire jouer son droit de préemption ?

L’apport d’un bien à une société constitue une cession à titre onéreux. Les coïndivisaires peuvent donc exercer leur droit de préemption. Si l’un des indivisaires désire acquérir les droits de l’autre, ce dernier est obligé de les lui vendre et ne peut donc pas les apporter à une SCI.

 Régime fiscal

Sur le régime fiscal des SCI de location.

RÈGLES COMMUNES À TOUTES LES SCI

5. Constitution

Une SCI doit être créée par au moins deux associés. Chaque associé fait des apports (exemple : sommes d’argent) et reçoit, en contrepartie et proportionnellement, des parts sociales.

Cas pratique

Un mineur non émancipé peut-il être associé d’une SCI ?

À titre de protection et pour leur éviter d’être indéfiniment tenus des dettes, la loi interdit aux mineurs d’être associés de sociétés civiles.

Toutefois, la jurisprudence admet, sous certaines conditions, que le mineur non émancipé puisse faire partie d’une SCI familiale. Mais il ne peut pas agir personnellement. Le contrat de société est signé en son nom par son représentant légal (généralement ses parents).

La réunion de toutes les parts entre les mains d’une seule personne (exemple : à la suite d’une succession ou d’une donation) n’entraîne cependant pas la dissolution de la société. L’associé unique dispose d’un délai de 1 an pour trouver de nouveaux associés, ou dissoudre et liquider la société.

Capital social : la loi n’impose aucun montant minimal.

La part des associés dans les bénéfices et pertes de la société est, en principe, proportionnelle aux apports.

À l’égard des tiers, les associés sont indéfiniment responsables des dettes sociales (et peuvent donc être engagés au-delà de leur apport initial).

Sur la situation du gérant.

6. Évaluation des parts sociales

La valeur des parts d’une SCI est essentiellement fonction de la valeur des immeubles qu’elle détient. De façon générale, la méthode d’évaluation des parts consiste :

• à apprécier la valeur de ces immeubles, en y ajoutant les autres éléments de l’actif social de la SCI,

• à déduire les dettes de la société (y compris les emprunts et avances en compte courant),

• et à diviser le montant ainsi obtenu par le nombre de titres composant le capital social.

7. Nantissement des parts sociales

Possible. Sur le nantissement.

8. Cession de parts sociales

Les parts sociales ne peuvent être cédées (par succession, donation ou vente) à un autre associé ou à un tiers qu’avec l’agrément de tous les associés (C. civ. art. 1861), sauf cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant.

Toutefois, les statuts peuvent y déroger et convenir :

• que cet agrément sera obtenu à une majorité déterminée,

• qu’il sera donné par le gérant seul,

• qu’il ne sera pas nécessaire pour les cessions consenties à des associés ou au conjoint de l’un d’eux.

9. Dissolution

Le Code civil prévoit 7 cas de dissolution d’une société civile :

• expiration du temps pour lequel elle a été constituée, sauf prorogation,

• réalisation ou extinction de son projet,

• annulation du contrat de société,

• dissolution anticipée décidée par les associés,

• dissolution anticipée décidée par le tribunal sur requête d’un associé pour des motifs légitimes (mésentente des associés paralysant le bon fonctionnement de la SCI, par exemple),

• dissolution anticipée prononcée par le tribunal sur demande de toute personne intéressée, après “réunion de toutes les parts sociales en une seule main” et à défaut de régularisation dans le délai de 1 an,

• tout autre motif prévu par les statuts de la société.

Lors de la dissolution d’une SCI de location, les associés se retrouvent en indivision. Chacun peut réclamer le partage :

• le capital social est réparti entre eux, en principe proportionnellement au nombre de parts détenues,

• les statuts, ou une décision de tous les associés, peuvent convenir de l’attribution de certains biens à certains associés.

Chaque associé est imposable au titre de la plus-value qu’il réalise, au prorata de sa participation.

FISCALITÉ DE LA SCI DE LOCATION

10. Vue d’ensemble

La SCI de location, également appelée “SCI familiale”, étant la plus répandue, seul son régime fiscal est analysé. Toutefois, sur bien des aspects, IR et plus-values notamment, le régime fiscal des SCI de construction-vente ou d’attribution est similaire.

En principe, les SCI ne sont pas passibles de l’IS (sauf option pour ce régime, dans les conditions de droit commun). Elles sont réputées fiscalement transparentes.

11. Fiscalité des apports à la SCI portant sur des immeubles

 TVA immobilière

Sont soumis à la TVA immobilière au taux normal de 20 % (+ droit départemental d’enregistrement au taux réduit de 0,7 % et taxes additionnelles pastedGraphic.png) les apports des associés portant sur des immeubles neufs ou achevés depuis moins de 5 ans.

 Imposition de la plus-value

L’apport d’un immeuble à la SCI constitue un transfert de propriété susceptible de dégager une plus-value, imposable au titre des plus-values immobilières réalisées par les particuliers.

Cette plus-value est égale à la différence entre la fraction de la valeur de l’immeuble équivalant aux droits acquis par les autres associés et le prix d’acquisition à hauteur de ce pourcentage.

12. Imposition des revenus : principe de la “transparence fiscale”

Chaque associé est imposable personnellement sur sa quote-part dans les bénéfices réalisés par la SCI, que ces revenus aient été ou non distribués (sauf cas particulier des SCI soumises à l’IS).

S’agissant d’un associé personne physique, ce dernier est donc imposable à l’IR, sur sa quote-part dans les bénéfices de la SCI, au titre des revenus fonciers.

Remarque

Dans le cadre du régime réel, sont, notamment déductibles du revenu brut foncier les intérêts d’emprunt versés à titre personnel pour souscrire au capital de la société.

Le régime micro-foncier s’applique dans les mêmes conditions que la détention en direct : autrement dit, la SCI ne doit pas être propriétaire d’un ou plusieurs immeubles ouvrant droit à avantage fiscal et ne doit pas avoir opté pour l’IS.

L’associé d’une société transparente qui donne en location, directement ou par l’intermédiaire de la société agissant en qualité de mandataire, le bien auquel ses parts lui donnent vocation peut bénéficier des réductions d’impôt en faveur de l’investissement locatif (exemple : la réduction d’impôt “Duflot/Pinel”) dans les mêmes conditions qu’un bailleur personne physique.

13. Imposition des plus-values de cession

 Cession de parts de la SCI

La plus-value réalisée à l’occasion de la cession de ses parts par un associé personne physique dans le cadre de la gestion de son patrimoine privé est imposable selon le régime des plus-values immobilières des particuliers. Elle est égale à la différence entre le prix de cession de ses parts et leur prix d’acquisition.

Remarque

Les associés qui cèdent leurs parts sociales étant réputés être directement propriétaires de l’immeuble, l’exonération accordée au titre de la cession de la résidence principale s’applique (toutes conditions étant par ailleurs remplies).

 Cession d’un immeuble détenu par la SCI

Chaque associé est personnellement imposable à raison de sa quote-part de la plus-value réalisée à l’occasion de la cession d’un immeuble détenu par la SCI. S’agissant d’un particulier, le régime des plus-values immobilières s’applique également.

 

14. Droit d’enregistrement

L’acquisition à titre onéreux de parts sociales est soumise à un droit d’enregistrement de 5 % normalement calculé sur le prix de vente, augmenté des charges.

15. Droits de succession ou de donation

Application du régime de droit commun.

Cas pratique

Un père de famille souhaite créer une SCI avec son fils. Il contracte un emprunt pour acquérir un immeuble. S’il donne ses parts à son fils, sur quelle base seront calculés les droits de donation ? La situation serait-elle différente s’il achetait, à l’aide d’un emprunt, un immeuble en indivision avec son fils sans créer de SCI ?

Dans le cadre d’une donation de parts de SCI, pour le calcul des droits de donation, la valeur des parts sera déterminée après déduction du montant non encore remboursé de l’emprunt.

En revanche, dans le cadre de la donation par le père de sa part d’indivision, pour le calcul des droits de donation, l’emprunt ne sera pas déductible. Les droits porteront sur la part indivise de l’immeuble possédée par le père.

IFI

En principe, application du régime de droit commun : la valeur au 1er janvier de l’année d’imposition des parts de la SCI, représentative des actifs immobiliers imposables détenus par la SCI, doit être intégrée dans l’assiette de l’IFI.

Remarque

Le contribuable de bonne foi ne subit pas de rehaussement s’il démontre qu’il n’était pas en mesure d’accéder aux informations nécessaires à l’évaluation de la fraction des parts de la société représentant son actif immobilier (CGI art. 965 3°).

Les sociétés ayant pour activité la gestion de leur propre patrimoine immobilier sont expressément exclues des activités opérationnelles éligibles à l’exonération d’ISF au titre des biens professionnels. L’administration fiscale indique cependant que certaines activités limitativement énumérées de gestion de son propre patrimoine immobilier, normalement exclues, sont considérées comme des activités commerciales éligibles, susceptibles d’ouvrir droit au régime d’exonération.

16. Abus de droit

Une technique consiste à démembrer un immeuble et à créer parallèlement une SCI. La nue-propriété de l’immeuble est apportée à la SCI en contrepartie de parts données aux enfants (permettant ainsi de transmettre un bien en évitant l’application du barème fiscal de détermination de l’usufruit), et les parents se réservent l’usufruit de l’immeuble. Sera alors retenue la valeur vénale de la nue-propriété du bien, souvent bien inférieure à celle du barème. Or, les droits de donation seront calculés sur la base de cette valeur.

Cette technique peut être jugée comme constitutive d’abus de droit en ce qu’elle présente un intérêt exclusivement fiscal. Plusieurs jugements successifs ont toutefois débouté l’administration fiscale, arguant de l’intérêt patrimonial d’un tel montage en ce qu’il permet notamment d’éviter les désagréments d’une indivision successorale en cas de prédécès du donataire.